Épisode 2 les huit comme générateur de mouvement
Bonjour et bienvenue dans ce deuxième épisode de Radio Tarot.
J’espère que vous avez passé un beau mois d’août. J’avais envie de commencer par vous dire merci, merci pour l’écoute, merci pour les retours, merci pour tout ce que vous m’avez donné. Je m’attendais pas à ça, je m’attendais pas à ce sentiment qui m’a accompagné tout le long de la canicule Grenobloise.
Aujourd’hui, on va se concentrer sur les huit.
J’ai envie de parler des huit parce que c’est le chiffre qui se retrouve le plus régulièrement dans le tarot. On a donc les quatre huit des suites, mais on a aussi les huit allongés au-dessus de la force, par exemple, le symbole de l’infinie. Peut-être, vous avez remarqué, j’ai choisi de commencer par les mineurs, parce que concernant les majeurs, il y a énormément de ressources qui existent. D’ailleurs, je voudrais vous conseiller celle de tarot bistro.
Et puis, vu qu’on vient quand même en France d’une tradition très orientée tarot de Marseille, on peut avoir la tendance de commencer le tarot et uniquement d’explorer les majeurs. Vingt-deux arcanes des grosses thématiques. Alors voilà, je ne juge personne, mais je trouve que faire des tirages de tarot uniquement avec les majeurs, ça rend les choses tout de suite très dramatiques. C’est un peu comme si à chaque fois qu’on se posait une question, on répondait par une dissertation. Des fois il n’y a pas besoin de ça, hein. Des fois il y a juste besoin de regarder qu’est-ce qui se cache en dessous de l’expérience quotidienne.
En tout cas, moi, c’est comme ça que j’aime apprendre, c’est comme ça que j’aime découvrir. Chaque instant de nos vies nous enseigne quelque chose. Des fois, on vit autre chose, on n’a pas envie de ça, mais chaque instant, à ce potentiel, d’ouvrir de la compréhension sur soi, sur les autres. J’aime bien créer du savoir avec des choses qui sont impropres et je trouve que le tarot invite ça.
Quand on parle des mineurs,
assez vite, on tombe sur la question de la numérologie. Il y a des choses qui sont extrêmement intéressantes avec la numérologie et puis il y a des choses qui vraiment profondément me fatiguent. Et une des choses qui me fatigue, c’est le fait de relier les nombre à des genres. On vit dans un monde binaire. On vit dans un espace où l’habitude est : je coupe les choses en deux, je les oppose, puis je raconte qu’ils sont complémentaires.
Quand j’ai découvert le tarot, je suis passée par là.
J’ai été au près personne qui racontait qu’il y avait d’un côté les chiffres féminins, de l’autre côté, les chiffres masculins. Très étonnamment, ce qui était de l’ordre de la féminité était de l’ordre de la passivité. Il y a un rôle qui a plus de valorisation, qui a plus de pouvoir, un rôle qu’on applaudit, qu’on acclame, qu’on envisage comme complexe et un autre qui devient naturel. Ce n’est pas suffisant de dire que l’impératrice peut être un homme.
Ce qu’on a besoin, c’est de vrai changement dans la manière dont on voit les choses, dans la manière dont on voit les rôles, dans la manière dont on se conçoit. C’est pas suffisant de dire qu’on a tous et toutes une part masculine et une par féminine. C’est un peu comme ce qu’est le tri et des déchets à l’écologie.
Moi, je pense qu’on peut couper les choses en beaucoup plus que ça. Et essayer de faire entrer une multiplicité d’histoire de concept dans deux cases hermétiques qu’on oppose, en est en 2023, je crois qu’on a autre chose à faire de nos vies.
Et puis, ce qui est intéressant avec les huit,
c’est que si on suit la logique, on est du côté passif de la force. Alors que pour moi, et c’est pour ça que j’ai envie de vous en parler aujourd’hui, les huit sont générateurs de mouvement. Ils viennent répondre à maintenant que je sais qu’est-ce que je fais.
- Est-ce que je reste, est-ce que je pars?
- Est-ce que je regarde ce que j’ai entre les mains?
- Est-ce que je regarde dans le ciel?
Pour moi, les huit sont ce qui se rapproche le plus de concept de développement personnel.
- On aurait, avec le huit de pentacles, croire dans le processus.
- On aurait, avec le huit de bâton, la synchronicité et la manifestation.
- On aurait, avec le huit d’épée, l’enfermement dans nos pensées.
- On aurait, avec le huit de coupes, la déviation dans le chemin de vie.
Comme avec toute chose du développement personnel, il y a des choses qui sont extrêmement intéressantes et qui nous permettent de mettre des mots juste, de se comprendre et puis, il y a des choses qui oublient qu’on n’est pas seul au monde, qui oublient qu’on est inscrit dans un système, dans des relations et qu’elle nous impacte. Il y a cette oscillation entre la détermination individuelle et la force de la norme. On oscille entre les deux. C’est-à-dire que oui, nous avons une capacité de transformer les choses, mais nous n’avons pas toute la responsabilité.
Parfois, nous sommes à des endroits et ce n’est pas de notre fait. Par contre, ce qu’on peut en faire, comment est-ce qu’on bouge à l’intérieur de cela, là et notre responsabilité. Et le huit vient de parler de ça, viennent de parler de mouvement, ses points où on rentre d’une manière et on en ressort d’une autre. C’est ça le huit. Tu rentres, tu bouges, tu sors.
Et c’est d’autant plus intéressant de commencer la rentrée avec ces cartes-là, de les avoir en arrière-fond.
Si t’as un jeu sous la main sort le, et sinon, laisse-moi te raconter.
Dans le huit de pentacle, on voit un artisan, une personne qui façonne de ses mains et à répétition quelque chose. Pour moi, cette carte, elle vient nous proposer de regarder le processus et non le résultat, de se concentrer sur le petit, sur le corps qui apprend le geste, sur la répétition.
Je crois la question qui me vient avec le huit de pentacle, c’est…
- Est-ce que je prends soin de mes outils?
- Comment je suis installé pour faire les choses qui me sont importantes?
- C’est quoi mon espace de travail?
- Mais aussi, avec quoi est-ce que je me compare?
- Pourquoi,c’est si important pour moi de regarder le résultat d’autres, plutôt que de regarder mon processus. Pourquoi j’ai envie que tout arrive tout de suite?
Pourquoi des fois, j’ai pas confiance dans ma capacité de grandir?
En face, nous avons le huit de bâton.
C’est une des rares cartes avec le 3 d’épée où il n’y a pas de personnage, où on ne regarde pas quelqu’un faire, on regarde des bâtons volés. En regardent cette énergie, cette création qui traverse le ciel. Le fait qu’il n’y ait pas de personnage qui crée la médiation entre moi et l’élément me donne vraiment l’impression que je suis à l’intérieur de la carte. Que ces bâtons y sont pour moi, que ce jaillissement, je l’ai souhaité. Qu’il me suffit de regarder, non plus mon travail, mais un peu plus loin pour voir la résonance, pour sentir l’énergie revenir, pour voir que ça va vite.
On se rapproche de la question de la synchronicité, avec celle d’ensuite qui est: est-ce que c’est moi qui a créé ça? Est-ce que c’est l’univers qui me répond? Où est la responsabilité? Ça parle donc de mouvements, de mouvements lent, répétés, de mouvements rapides et jaillissants, de regarder ses mains, de regarder en l’air.
En ce qui concerne nos mouvements, nous avons l’autre binôme, le 8 d’épée et le 8 coupe.
En premier plan, nous avons huit coupes, bien alignées et puis, juste derrière, une personne qui tourne le dos, qui décide de quitter, qui décide de se lever, de se casser. Cette carte pour moi, elle vient parler du moment où, ça en est trop, où on a fini, où il faut passer à autre chose. Elle est comme un rappel de l’importance de ne pas s’acharner. Dans le 8 de pentacle, j’ai appris à continuer, dans le 8 coupe, j’ai appris à quitter. Quitter alors qu’on a les honneurs, choisir de ne plus jouer à ce jeu-là, sentir qu’il y a autre chose pour nous ailleurs et ne pas en avoir peur.
Je trouve que le domaine des coupes, le domaine émotionnel, est une des familles dans lesquelles il y a le plus les enjeux de qu’est-ce que je prends, qu’est-ce que je laisse. Avec cette crainte de, mais alors, si je dis non, qu’est-ce qui aura après? Est-ce que ça va revenir?
Oui, le tarot est cyclique,
les coupes reviennent toujours. Le trajet des coupes, pour moi, est le trajet de la digestion. Suis-je prête à accueillir une nouvelle émotion? Une des miennes, une des autres. À quel moment j’ai besoin d’une pause? Qu’est-ce qui me permet de ne pas saturer?
Et le 8 de coupe, je suis là, j’ai la reconnaissance. J’ai travaillé pour obtenir tout ça. Ça peut être à des endroits très petits. Ça peut être à des endroits beaucoup plus impliquant, sentir que c’est le moment de faire peau neuve, sentir qu’on a autre chose à vivre ailleurs et ne pas encore savoir ce que c’est. Partir son grand chose, recommencer le voyage du fou à l’intérieur des mineurs. Ne pas vouloir jouer ces jeux-là, ne pas vouloir habiter ce rôle, ne pas vouloir les contraintes qui vont avec la reconnaissance. Choisir d’aller ailleurs.
Et le 8 d’épée?
Moi quand je suis face au huit d’épée, j’ai envie de demander, mais qu’est-ce qui s’est passé pour que tu te retrouves-la? Comment une partie de colin-maillard peut terminer comme ça ? Alors pour un peu de contexte, le 8 d’épée, nous avons une personne, les yeux bandés, les mains attachés, les pieds sont libres, dans la campagne, entourés d’épées plantées un peu tout autour.
Cette carte, elle me crée des émotions parce que je trouve que c’est vraiment une très bonne représentation de la dépression. Cette carte, elle parle de ne plus savoir par où aller, de ne plus voir où est-ce qu’on est. Si cette personne va un peu à gauche à droite, elle va tomber sur des épées, certes, elles sont coupantes, mais c’est ce dont elle a besoin pour se défaire de ses liens.
Je crois que ça fait un bout de temps qu’elle est là, et qu’elle a oublié le chemin pour faire autre chose, qu’elle a oublié le chemin pour regarder ailleurs. Le 8 d’épées, il me parle des moments de séparation avec mon corps, des moments où, un peu comme une seiche, je sors de l’encre tout autour de moi et ensuite je n’y vois plus rien, et je me dis le monde est noir. Et ce n’est pas pour dire que c’est de notre faute quand on n’arrive plus à être touché par la lumière, par la douceur, par un geste. C’est pas de notre faute, mais se sortir de cette situation ça va l’être. À quel moment cette personne a accepté de rétrécir, à accepter de s’entraver. C’est dit que c’était une bonne idée, peut-être même qu’elle méritais ça.
Moi c’est ce que j’ai vécu avec la dépression, je méritais ça, je voyais pas autre chose, je voyais pas comment aller ailleurs, quoi faire. Quand je vois cette carte, j’ai envie d’appeler cette personne. J’ai envie qu’un son parvienne jusqu’à ses oreilles. J’ai envie de lui demander, Comment tu t’es retrouvé là? Est-ce que tu te souviens? Est-ce que tu te souviens quand tu étais en train de jouer? Est-ce que tu te souviens?
Moi j’ai l’impression que je me suis retrouvé là à force d’acharnement.
Je me suis trouvée là, parce que je n’ai pas capable de me dire, maintenant je me lève et je me barre. Et petit à petit, doucement, je me ratatine.
Je me rends compte que cette épisode est pas complètement joyeux. Je ne sais pas tout à fait comment le conclure, mais je trouve que c’est des bonnes questions à se poser à la rentrée. Oui, avoir les huit, en fin d’été, c’est assez intéressant. Parce que c’est des cartes qui appellent le mouvement, qui nous montrent quand on n’y est plus, qui nous montrent les endroits où on le voudrait.
Je trouve que quand on a vécu une expérience transformante, c’est assez rapide de retourner à nos habitudes, de retourner au connu. Alors qu’on sait, on sait qu’elles nous avaient plu ces choses-là et qu’elles nous ont profondément bouleversées. Et qu’on s’est dit que ça serait le début de nouveauté et puis le rythme reprend. La nuit est de plus en plus tôt, l’énergie baisse, on retrouve le connu. Alors, j’ai envie de vous inviter à penser aux huit dans cette rentrée, à se dire :
- Où est-ce que j’ai envie de croire dans mon processus de transformation ?
- Quelles sont les choses sur lesquelles j’ai hâte de me voir évoluer ?
- Quelles sont les choses que j’ai envie de fabriquer de mes mains et de réfléchir, quel temps, quel contexte, quelles comparaisons je fais pour m’encourager ?
J’ai envie de vous enjoindre à quitter ce qui ne vous convient plus.
À vous dire que même si ça a l’air très brillant, même si c’est pour cela qu’on a de la reconnaissance, on a envie de jouer à autre chose. On a envie d’un autre jeu, on a envie d’autres comparses. Et en partant seul, c’est à peu près sûr qu’on va les trouver.
J’ai envie de vous enjoindre à regarder les moments où ça va vite, les moments où tout est un peu dirigé et d’y croire. De croire qu’il y a quelque chose à cet endroit-là, il y a cette énergie qui bouillonne, qui a envie de sortir, qui a envie de jaillir, c’est une belle activité d’automne de laisser le jaillissement sortir.
Et j’ai envie, surtout, qu’on puisse se prendre par la main quand on se trouve à cet endroit, à cet endroit précis, un peu marécageux, où il y a plus trop de mouvement, ya plus trop de corps, il y a juste beaucoup de pensées, comme une boucle.
Parce que le huit, on peut aussi le voir comme une boucle. Et c’est aussi pour ça que ça parle de mouvement. Il y a cette boucle avec juste notre tête, les ruminations. Elles n’arrivent pas n’importe quand ces ruminations. Elles arrivent, en tout cas pour moi, quand j’ai trop donné et que j’ai oublié. Le huit, il arrive aussi dans le processus de constant apprentissage, dans l’automatisation du corps par rapport à une tâche, une activité. S’avoir où est cet objet, savoir comment est ce qu’on le prend, comment est ce qu’on le cogne, comment est ce qu’on le pose. Et pour moi, le huit de bâton, il sort justement de ce cycle, de ces boucles. On a pris assez d’élan, on a répété assez de fois avec ses yeux le huit et là hop ! Ça sort ! Où est-ce que ça va, on sait pas. Mais ça va se planter ailleurs. Est-ce qu’on a la curiosité de voir ou c’est ? Et pareil pour le huit de coupe. C’est moi jaillissant, mais c’est encore une sortie. Je sors de ce grand huit. Je joue à un autre jeu. Je vais voir ailleurs si j’y suis.